« Chers collègues,

Ces dernières semaines, des agressions graves ont eu lieu dans notre ville. J’ai dénoncé ces actes islamophobes. L’un d’eux a même débouché sur un drame puisque la victime a fait une fausse couche. J’ai eu un contact direct avec son mari pour lui dire ma révolte, ma vigilance, ma solidarité et celle de l’ensemble des élus et des habitants d’Argenteuil. Je réunirai prochainement le Conseil du vivre ensemble, comme je l’avais fait après l’agression de la synagogue, pour réfléchir et agir avec sagesse suite à ces tristes événements.

Car en agressant ces deux Argenteuillaises, Rabia et Leïla, on a aussi voulu agresser Argenteuil. En visant ces jeunes femmes, on a voulu semer la discorde dans une ville qui privilégie la concorde mutuelle. En s’en prenant violemment à elles, on a voulu semer le trouble dans les esprits de nos concitoyens qui, tous, veulent vivre dans une ville – dans un pays même – où l’on peut croire ou ne pas croire sans crainte ni conséquence.

Comme chacun d’entre vous, et même au delà de cette salle, j’attends les résultats de l’enquête, pour qu’enfin nous sachions qui sont ces « on » et que ces actes soient punis, au même titre que l’agression homophobe, à Paris, qui a envoyé à l’hôpital Olivier et Wilfried, ou celle, également à Paris, qui a coûté la vie à Clément Méric. Aucune agression, d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la victime, n’est admissible.

Les violences, les intimidations et les tentatives de pressions exercées récemment sur des élus et sur des agents du service public ne le sont pas d’avantage. Peu importe ce qu’il s’arroge le droit de représenter, un caïd n’a pas sa place à la table de la République. Et nous voulons que la République vive partout à Argenteuil. J’appelle celles et ceux qui se sont égarés à se ressaisir. Et je vous assure de mon entière détermination à pourchasser toute entrave à la République. C’est un principe, pas une base de marchandage.

Je veux saluer le sang froid et la sérénité dont a fait preuve l’immense majorité des Argenteuillais au moment des agressions de leurs concitoyennes. Tous ont été touchés par ces actes violents. Nombreux sont ceux qui n’ont pas compris, ni admis, les récupérations de ces drames, par des personnes qui vivent ou qui ne vivent pas à Argenteuil.

En votre nom à tous, j’indique solennellement à tous ceux qui sont ou seront tentés, au mépris de l’intérêt commun des Argenteuillais, de semer le désordre afin de se faire passer pour des moralistes de l’ordre : ils me trouveront sur leur chemin. Nous avons déjà vécu cela dans notre ville, dans le passé, et nous sommes nombreux à être déterminés à empêcher, ou rendre inefficaces, ces petits jeux à profit personnel.

Non, ce n’est pas Argenteuil qui est en cause dans l’agression de deux jeunes femmes vivant ici, c’est la stupidité d’un racisme plus ou moins entretenu. Non, ce ne sont pas les Argenteuillais qui sont en cause dans le drame vécu par ces familles Argenteuillaises, c’est l’absurdité de la violence de notre société. Non, ça n’est pas notre politique tendue vers un vivre ensemble harmonieux et équilibré qui est en cause dans les coups portés à ces deux jeunes femmes de religion musulmane, ce sont les dégâts de la besogne de ceux qui veulent une société du tous contre tous où les plus faibles sont écrasés.

Je salue l’attitude des partis de gauche et du Modem. Sans abdiquer leur libre arbitre ou leurs nuances, leurs réactions respectives ont été exemplaires et très attentive à l’intérêt commun des Argenteuillais.

Nous tous qui vivons ici, nous savons les réalités humaines de notre ville, ses subtilités. Nous savons que François Mitterrand avait raison quand il disait, il y a plus de 30 ans, que « tout est intolérance. Tout nous invite à ne pas tolérer l’autre, à ne pas l’accepter, à défendre son quant-à-soi par une sorte de mouvement animal qui nous porte à considérer comme une atteinte à notre personnalité l’adresse que l’autre nous fait ». Mais nous savons aussi que c’est dans l’équilibre que se trouve la solution.

C’est la laïcité qui est le cœur de l’équilibre Argenteuillais. La laïcité, c’est à dire le fait que croire, quelle que soit la croyance, ou ne pas croire ne crée pas de condition citoyenne particulière. Cette ligne de conduite, et elle seule, nous permet de traiter chacun à égalité, avec la même attention et le même respect.

Car jamais, pour nous, il ne pourra y avoir un Argenteuil que nous aimons et un Argenteuil que nous n’aimons pas. C’est séparés que nous échouerons à redonner un avenir à notre ville. Et c’est tous ensemble, chacun en fonction de ses possibilités et de ses mérites, que nous réussirons ! Argenteuil est un tout, un ensemble.

Nous avons été soumis à rude épreuve ces dernières semaines. Je compte sur l’exemplarité de chacun d’entre vous, chers collègues. C’est à nous de distiller l’espoir, pas la haine, c’est à nous de tisser les liens, pas de les rompre grossièrement.

La République doit être plus forte que nos acrimonies !

C’est votre devoir.

C’est notre devoir.

C’est mon devoir.

Soyons, encore une fois, à la hauteur de ce qu’attendent nos concitoyens, les Argenteuillais.

Je vous remercie de votre attention »