Ce samedi à 10 h 30, les militants communistes d’Argenteuil organisent un regroupement symbolique devant les agences BNP Paribas et Société Générale du centre-ville. Ils entendent dénoncer la « spéculation bancaire ». Pendant que certains distribuent des tracts, d’autres collent des affiches sur l’avenue Gabriel Péri. Au même moment, à quelques mètres de là, se déroule une manifestation locale organisée par la commune : « la promenade végétale ». Un employé municipal présent sur place interpelle deux membres du PCF. « Je travaille à la mairie, enlevez ces affiches, tout de suite ! ça gêne notre événement! ». « La rue appartient à tout le monde », rétorquent les militants. L'employé s’éloigne et passe un coup de fil. Peu de temps après des agents de sécurité font leur apparition. Ils commencent à arracher des pancartes. Le ton monte avec la poignée de manifestants. Deux policiers municipaux interviennent. Ils sont très vite rejoints par cinq collègues qui sortent de leur véhicule de service gyrophares en fonction. Les affiches sont arrachées, jetées à la poubelle. Les esprits s'échauffent un peu plus. Sur place, une journaliste de la télévision du Val d’Oise se concentre sur son sujet. Manon Beauvillain est étudiante en dernière année de journalisme et pigiste pour VOtv depuis 2012. Elle règle sa caméra pour interviewer l’un des représentants du PCF sur les raisons de cette action militante quand elle est prise à partie par une policière municipale. « Ici, ce n'est pas le Festival de Cannes, je ne suis pas actrice. Vous n'avez pas le droit de me filmer ». La pigiste de 24 ans assure à la fonctionnaire qu’elle n’était pas dans le viseur de son objectif. Elle décline son identité tout en précisant qu’elle réalise un reportage pour VOtv. « Vous, vous êtes journaliste ? Attention, je peux vérifier. L'usurpation d'identité, ça peut aller très loin ! ». « Sur ordre de M. Doucet, vous remballez votre matériel et vous allez me suivre ».
Manon présente sa carte d'identité, sort une carte de presse éditée par son école et propose à l’agent d’appeler le rédacteur en chef de VOtv. La policière municipale lui ordonne de « tout remballer », et de lui remettre ses images. La jeune journaliste refuse. La fonctionnaire insiste. « Sur ordre de M. Doucet (le maire PS d’Argenteuil, NDLR), vous remballez votre matériel et vous allez me suivre ». La pigiste de la télévision du Val d’Oise refuse. « Madame, je n’ai pas terminé mon travail ». La journaliste rappelle les droits de la presse, notamment sur la voie publique, et s’étonne que le maire puisse donner un tel ordre. Et l'agent d’asséner: « nous n'intervenons que sur sa demande ».Et d'ajouter « vous feriez mieux de filmer la promenade végétale, juste derrière nous, au lieu de venir sur les manifestations ». Pendant ce temps, le calme est revenu entre manifestants et agents de la Police municipale. Deux policiers de la nationale sont maintenant sur place. La fonctionnaire de la ville d’Argenteuil leur fait signe : « Il faudrait vérifier l'identité de cette personne », dit-elle en pointant du doigt la journaliste. La journaliste de VOtv quitte les lieux entre deux policiers. « Vous allez nous suivre mademoiselle, nous allons faire un rapport au poste ».
Manon attendra un long moment au commissariat. Après vérification de son identité, un policier visiblement gêné par la tournure des événements lui confiera « passer tout le temps derrière les municipaux pour réparer leurs bourdes ». Manon sortira du commissariat d’Argenteuil à 15h30. A l’hôtel de ville d’Argenteuil, l’incident est pris au sérieux. « Évidemment aucune consigne n’a été donnée. Le maire est très ennuyé. Il va appeler la journaliste pour s’excuser », fait savoir le directeur de cabinet de Philippe Doucet. « Un rapport a été commandé », ajoute ce conseiller du maire. |